lunes, noviembre 02, 2015

Les premières victimes sont les Catalans


 

Ma syntonie intellectuelle et mon empathie cordiale sont maximales et inconditionnelles envers vous, les victimes les plus directes de la situation illégale et brutale qu'a créée la Generalitat "légalement disqualifiée".
Je te remercie, Rafael, pour la clarté diaphane de cet article, qui touche au plus profond mes sentiments de solidarité avec tous nos compatriotes qui subissent cette absurde épreuve.
"L'administration retient les mécanismes pour imposer ses décisions par la force mais en agissant déjà en marge de l'ordre qui l'a dotée de ces mécanismes. Pour la première fois depuis la restauration de la démocratie, nous ressentons la détresse juridique crue et sans nuance…
Non, ce n'est pas indifférent pour le citoyen, loin s'en faut. Il est gravissime que les institutions autonomiques nous placent dans cette situation et il est douloureux de constater que, devant ce fait, la syntonie et l'empathie de l'ensemble des citoyens espagnols et des forces politiques et des institutions de notre pays ne soient pas maximales et inconditionnelles."
Image: LP
Les premières victimes
RAFAEL ARENAS GARCÍA

2015/11/02.
Les séparatistes regrettent que la Catalogne soit une "nation sans Etat", mais ils ne remarquent pas que le processus qu'ils ont initié conduit les catalans à devenir des "citoyens sans Droit" ou, ce qui revient au même, à se voir soumis à un pouvoir politique qui agit en marge de la loi; et cela, au-delà du conflit institutionnel, implique aussi un dommage direct aux individus, qui se voient privés des éléments fondamentaux dans un Etat démocratique que sont la sécurité juridique, le contrôle de l'administration par les tribunaux ou le respect de la loi par le pouvoir public.
Aucun de ces principes ne semble important pour les partis et associations séparatistes, qui font étalage de leur volonté d'agir en marge et en opposition avec le Droit; et ces principes ne sont pas non plus suffisamment soulignés ni par les média ni par les responsables politiques qui se sont prononcés jusqu'ici à propos du défi indépendantiste. Il semblerait que la seule chose importante soit le conflit institutionnel que je viens de mentionner, et que les citoyens n'en sont que des spectateurs ou des otages.
Et cependant, c'est nous, les citoyens, qui subissons les conséquences de la rupture de légalité que mènent les autorités de notre Communauté autonome. Du point de vue des citoyens, il ne peut être indifférent que la nouvelle présidente du Parlement de Catalogne, Carme Forcadell, déclare la fin de l'étape autonomique. Il ne suffit pas de rester sur le débat de savoir s'il y aura ou non un Etat catalan comme conséquence du processus sécessioniste, mais nous devons aussi noter qu'une telle déclaration implique déjà l'élimination d'une administration qui devrait être au service du citoyen. Il se peut que les séparatistes ne réussissent pas leur projet de créer un nouvel Etat sur le territoire de la communauté catalane, mais il est certain que les institutions autonomiques renoncent à continuer à l'être et privent les citoyens d'une administration essentielle dans l'architecture constitutionnelle, d'un élément clé pour le gouvernement dans notre société.
"Le fait que les pouvoirs publics abandonnent la légalité n'est pas un pur conflit institutionnel. C'est quelque chose de plus grave."
La Generalitat de Catalogne ne l'est donc déjà plus. Elle déclare qu'elle ne se considère plus comme une institution autonomqiue et, en outre, elle proclame qu'elle agira en marge de la loi; mais elle ne renonce pas à exercer le pouvoir public. La Generalitat et les administrations locales catalanes continuent à nous rappeler qu'elles maintiennent le monopole de la coaction, malgré le fait qu'elles ont explicitement exprimé leur volonté de ne pas se soumettre à la loi. Il s'agit d'une situation inadmissible. Le respect de la loi par le pouvoir public est une avancée dans les droits des citoyens à laquelle nous ne pouvons pas renoncer. Un pouvoir poublic qui prétend agir en marge de la légalité nous fait revenir en arrière jusqu'à l'Ancien Régime, à l'époque antérieure à la Révolution française.
Dans quelle situation nous trouvons-nous, nous les Catalans ? Le pouvoir public qui s'exerce dans notre Communauté autonome ne répond plus à ce qui est prévu dans le cadre de vie commune dont nous nous sommes dotés en son temps. L'administration retient les mécanismes pour imposer ses décisions par la force mais en agissant déjà en marge de l'ordre qui l'a dotée de ces mécanismes. Pour la première fois depuis la restauration de la démocratie, nous ressentons la détresse juridique crue et sans nuance… Nous ne parlons pas de déficits démocratiques ou du mauvais fonctionnement de l'administration, mais de la confrontation entre les citoyens et ceux qui prétendent exercer le pouvoir public en marge du Droit.
Que celui qui a la capacité d'exercer le pouvoir public, y compris l'usage de la force, déclare qu'il ne se sent pas soumis à la loi crée une incertitude qui, dès qu'on y pense, est difficilement supportable. En outre, dans certains cas, cette insécurité cesse d'être hypothétique et devient une agression directe, comme par exemple lorsque, lors de la consultation du 9 novembre 2014 suspendue par le Tribunal constitutionnel, plusieurs fonctionnaires ont reçu des "indications" sur la manière dont ils devaient outrepasser l'interdiction de collaborer à cette consultation, que ce Haut Tribunal avait établie. La confrontation du citoyen avec un pouvoir public qui refuse de se soumettre à la loi et aux tribunaux devrait être une pure hypothèse de laboratoire dans n'importe quel Etat de Droit et, cependant, nombreux sont ceux en Catalogne qui peuvent témoigner de ce que suppose un tel affrontement.
"Tolérer que les administrations et les pouvoirs publics abandonnent le cadre constitutionnel est plus grave : c'est le mépris des citoyens et des droits."
La proposition de déclaration présentée au Parlement de Catalogne par Junts pel Sí et la CUP le 27 septembre dernier prétend rendre général et solennel ce décrochage des règles et des normes que nous subissons en Catalogne depuis plus d'un an.
Celui qui devrait être l'organe suprême de représentation des citoyens dans le cadre des compétences que définissent la Constitution et le Statut d'Autonomie, le Parlement de Catalogne, se prépare pour annoncer formellement son décrochage de l'ordre juridique et pour presser le Gouvernement autonomique d'en faire autant. Est-il indifférent pour les citoyens que ce pouvoir public qui contrôle la santé, l'éducation, la police, les medias publics, les chemins de fer, les routes, les universités et beaucoup d'autres infrastructures et services se présente devant nous tous comme un simple pouvoir de fait, détaché des lois et opposé au cadre de vie commune auquel nous avons tous droit ?
"La Generalitat ne se considère pas comme une institution autonomique et proclame qu'elle agira en marge de la loi; mais elle ne renonce pas à continuer à exercer le pouvoir public."
Non, ce n'est pas indifférent pour le citoyen, loin s'en faut. Il est gravissime que les institutions autonomiques nous placent dans cette situation et il est douloureux de constater que, devant ce fait, la syntonie et l'empathie de l'ensemble des citoyens espagnols et des forces politiques et des institutions de notre pays ne soient pas maximales et inconditionnelles.
Tolérer que les administrations et pouvoirs publics abandonnent le cadre constitutionnel n'est pas un simple conflit institutionnel, c'est quelque chose de plus grave : c'est le mépris des citoyens et des droits qui - pensions-nous – nous étaient garantis.
Nous, citoyens catalans, sommes sans doute les premières victimes de l'insurrection séparatiste.
Rafael Arenas García est président de Societat Civil Catalana et professeur ordinaire de droit international privé à l'Université autonome de Barcelone.


 
17:45 Écrit par SaGa Bardon dans Actualidad 

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